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Une nouvelle voie


Je vis en communauté à la campagne
J'y découvre le végétarisme.
J'y découvre aussi le naturisme.
Je découvre les thérapies de groupe.
Je découvre le contact physique
Le "Co-conseil"
Je fais de la Bio Energie
Le
Katsugen de Itsuo Tsuda
Je découvre la Gestalt Thérapie
Un groupe Anti-Psychiatre
Je fréquente les Alcooliques Anonymes
Je pratique la macrobiotique
Je pratique l'instinctothérapie

Je vis en communauté à la campagne

Une nouvelle vie commença pour moi.
L'association disposait d'un grand domaine, d'un hectare environ, à Saint Geneviève des Bois, grande banlieue Sud de Paris.
C'était un ancien monastère entouré de murs.

On pouvait y vivre une vie indépendante du monde alentour (fait de HLM).
Il était constitué de quelques bâtiments de structure ancienne et de caractère, eux-mêmes indépendants, dispersés dans le parc.
Il était essentiellement dévolu au jardinage, puisque cela correspondait au but de l'association, avec des arbres fruitiers et notamment d'immenses cerisiers que nous cueillions à la saison, perchés sur de grandes échelles d'aluminium.
Mais le président et la présidente faisaient du cheval, et nous hébergions également 2 chevaux, qui avaient leur espace herbeux entouré d'une clôture faite en poteaux électriques de bois, réformés.
Le président était très bricoleur et était passé maître dans l'art de récupérer et retaper de vieilles voitures, notamment des Citroën : 2 CV, DS, et un camion en tôle ondulée, dit "Tube".
Et pour les grandes vacances, il était parti avec sa famille à l'avant du Tube, et les deux chevaux à l'arrière, la queue dépassant par la porte, et la tête sur l'épaule des passagers de la banquette arrière, qui profitaient à cette occasion de leurs gros bisous mouillés.
Ils avaient passé de très bonnes vacances, à la fois en voiture et à cheval.

La communauté était végétarienne. Les repas se prenaient en commun.
Seuls ceux qui avaient déjà une famille constituée (une seule, en fait, composée d'un couple et d'une petite fille) prenaient leurs repas à part.
La communauté tournait autour du centre constitué par le président, sa femme, et leurs enfants.
Nous prenions nos repas chez eux, sauf le petit déjeuner qui ne demandait pas de préparation spéciale, que nous prenions chacun dans nos lieux de résidence respectifs.
Il y en avait en fait trois :
Celui du Président, la présidente et leurs enfants, et une femme célibataire qui leur était très proche et sa petite fille, était dans l'ancien couvent.
C'était là que nous nous retrouvions pour les repas du midi et du soir.
C’étaient ces deux femmes qui les préparaient.
Celui des célibataires, une grande maison carrée en briques à plusieurs étages où chacun avait sa chambre, et où se trouvaient les bureaux de l'association.
C'était à la fois un lieu de travail et de résidence, avec la salle commune pour les petits déjeuners et réunions diverses.
Enfin, dans une maison de plein pied à l'écart, se tenait le secrétaire, sa femme et sa petite fille. Il vivait complètement à part des autres, et ne les voyait que pour les activités.

J'y découvre le végétarisme.

C'était la première fois que je goûtais à ce type de nourriture et je trouvai cela agréable.
Il ne s'agissait pas simplement de supprimer la viande, mais surtout de manger des produits sains et complets, produits de façon biologique.
La viande était mise à l'index pour plusieurs raisons : biologique, psychologique, et philosophique.
C'est vrai que l'abus de viande n'est pas bon pour le corps.
Sans forcément la supprimer, on pourrait en manger très modérément.
Ensuite, l’absorption régulière de viande a un effet sur le psychisme : on devient plus agressif (paraît-il).
C'était la première fois que j'entendais parler d'une influence possible de la nature de la nourriture ingérée sur l'esprit. Ces deux domaines, matériel et immatériel, je les concevais jusqu'à présent comme totalement séparés.
Mon expérience ultérieure me confirma que non.
Enfin, sur le plan philosophique, c'était bien de ne pas tuer des animaux même pour manger, et je reconnais que cela instaurait une sorte de paix, peut-être due à la bonne conscience.
Dans la communauté, aucun animal n'était tué, même pas les chats qui se reproduisaient librement, mais on n'en était pas envahi, les petits se perdaient à droite et à gauche.
Pour les chats, les laisser se perdre était peut-être une façon de se dégager de ses responsabilités.

J'y découvre aussi le naturisme.

Je découvris aussi dans ce groupe le naturisme.
Dès que la belle saison arrivait, tout le monde se retrouvait nu.
C'était inhabituel pour moi, mais finalement je m'y fis très bien. Cela cadrait bien avec l'esprit d'innocence et de bonne conscience qui sans doute nous animait tous. C'était un peu comme au temps d'Adam et Eve, avant le péché originel. Cela me sembla tout à fait naturel de voir le sexe de l'autre, comme de voir son nez.

Cependant une fois un évènement me donna matière à réflexion.
Je ressentais habituellement dans la communauté cet état d'innocence et de paix.
Un jeune couple était arrivé et s'était installé avec nous.
Elle était très belle, et naturellement se promenait nue, comme les autres. J'admirais, mais cela ne me troublait pas.
Puis le président et sa famille partirent en vacances, avec "Tube" et chevaux.
Et là je sentis un changement d'atmosphère. Elle n'était plus aussi paisible, et je fus troublé par la jeune femme, spécialement un jour où elle marchait devant moi et se pencha brusquement en avant pour ramasser quelque chose, me présentant ingénument son postérieur !
Pour prévenir une aggravation possible je m'en ouvris à son compagnon, qui me comprit bien et lui demanda d'être plus attentive.

Quand le président et sa famille revinrent, l'atmosphère calme et innocente se réinstalla (pour moi, en tout cas).
J'en déduisis que c'étaient eux qui généraient et transportaient avec eux cette atmosphère, sans doute grâce à leur activité spirituelle.
Ils faisaient paraît-il partie des Rose-Croix, et avaient en permanence une bible ouverte dans leur chambre et pratiquaient beaucoup la prière.
On disait aussi qu'ils n'avaient pas de relation sexuelle, dans un but de développement spirituel (était-ce vrai ?).
Ils avaient en tout cas quatre enfants.
Et ils ne faisaient pas de prosélytisme, c'est pour cela que nous n'avions que des suppositions.
En tout cas c'était la première fois que je remarquai que des personnes pouvaient déterminer une atmosphère, ou un climat, et cela me frappa considérablement.

Et progressivement, cette atmosphère changea pour moi.
Au bout de deux ans, je commençai à la trouver lourde et oppressante.
Ce n'était pas seulement ma subjectivité. Un malaise s'était installé dans la communauté.
On trouvait qu'il n'y avait pas suffisamment d'échanges entre nous.
Toute notre disponibilité était centrée sur le travail, qui était planifié et organisé par le président et lui seul.
Nous avions bien obtenu quelques réunions d'organisation, mais il trouvait que c'était une perte de temps.
Il y eut donc des oppositions à ce principe de fonctionnement, des départs, et moi-même finis par trouver l'atmosphère si étouffante de non-communication que je me décidai à partir.
Je trouvai une charmante petite chambre dans l'île Saint Louis, où j'étais réveillé le matin par les moineaux.

Je découvre les thérapies de groupe.

J'étais toujours en quête d'une thérapie. J'allai voir un "sexologue humaniste", Michel Meignant, car je me sentais complètement inhibé dans ce domaine, qui m'orienta, pour participer à des séances de thérapie de groupe et me débloquer "d'une façon générale", vers une association, le "Centre d'Epanouissement Arkana", animé par Tran N'guyen et Isabelle.
Cette association pratiquait des prix adaptés aux revenus de chacun, et les tarifs étaient à ma portée.
J'arrivais à m'offrir régulièrement un W.E. par mois.
Mon premier séminaire fut une vraie révélation.
Les animateurs mélangeaient Gestalt , Bioénergie, Rencontre.
Je fus surtout frappé des manifestations émotionnelles très fortes qui surgissaient spontanément, de l'émergence rapide de l'angoisse, la peur, etc...
Le talent des animateurs faisait sortir de nous les émotions cachées, ou même refoulées, et par des mises en situation ils nous donnaient l'opportunité d'abandonner les anciens comportements basés sur la peur et d'en expérimenter de nouveaux, plus épanouissants.

Mais ces "changements comportementaux" n'étaient pas évidents à obtenir.
Je me souviendrai toujours d'un pauvre monsieur, très effacé et discret, qui dans son histoire personnelle rapporta qu'à l'école, quand il était enfant, ses camarades de classe se moquaient de lui et l'avaient pris comme souffre-douleur.
L'animateur lui demanda par quel surnom ils se moquaient de lui, il dit :"crapette".
L'animateur demanda au groupe de se réunir autour de ce monsieur en le traitant de "crapette".
Le pauvre protesta puis finit par s'écrouler par terre, terrassé par la peur et par la honte.
Il était resté dans son comportement d'enfant effrayé.
Je ne le revis plus dans les séminaires suivants.
Je trouvai cette méthode très dure.

Néanmoins, pour moi, cela avait "marché".
Je me sentais plus fluide émotionellement, et surtout empli d'énergie.
Je remarquai cela spécialement parce que je faisais du vélo, et qu'à la sortie de ce séminaire je pédalais spontanément d'une façon beaucoup plus vigoureuse et sans effort.
J'étais enthousiasmé par la perspective de progrès personnel que m'offrait cette nouvelle approche thérapeutique.
De plus ces séminaires me mettaient au contact de nouvelles personnes avec lesquelles j'avais des objectifs semblables et avec lesquelles je créais des liens.

Je découvre le contact physique

Je trouvais Tran très froid et distant, comme sont souvent les asiatiques, et je ne l'aimais pas trop, mais sa coanimatrice, Isabelle, était très chaleureuse et aimante, et me mettait très en confiance.
Au cours de ce 1er séminaire, mon angoisse habituelle avait disparu comme par enchantement.
Elle me dit, à la fin du stage, que si je me sentais à nouveau mal et angoissé, je pourrais l'appeler personnellement à toute heure du jour et de la nuit.
Je fus très touché par cette offre, et effectivement, au bout de quelques jours, mon angoisse revint.
Je l'appelai. Elle me donna rendez-vous au jardin du Luxembourg.
Elle arriva, tranquille et sereine. Nous nous assîmes sur un banc, côte à côte. Elle ne dit rien, et se contenta de poser son bras autour de mon cou et sur mon épaule.
A mon grand étonnement, ce simple geste m'apaisa et je me sentis bien.
Il ne fut question de rien, nous ne nous dîmes rien, et au bout d'un moment elle me demanda si cela allait, et partit.

Cet épisode me fit beaucoup réfléchir. Ce simple geste avait remplacé quantité de médicaments.
Je pris conscience que je pouvais simplement avoir besoin, dans ma vie, de contacts physiques (chaleureux, de préférence), dont l'absence créait l'angoisse.
J'appris dans ces groupes à en donner et à en recevoir. Je n'avais jamais appris cela au cours de ma vie personnelle privée, n'ayant pratiquement jamais eu de famille, ni frères et soeurs.

Le "Koula"
L'association invitait des animateurs extérieurs, et il y avait des groupes "spécialisés" dans le contact humain avec la dimension physique.
Par exemple, il y avait le "Koula" : Le groupe donnait une écoute attentive et inconditionnelle à une personne, puis lui donnait de l'énergie en posant les mains sur son corps, la personne étant allongée par terre, et il y avait de grandes embrassades où on se serrait très fort deux par deux l'un contre l'autre, en faisant cela avec successivement chaque membre du groupe.
Le mot "Koula" venait d'une coutume des îles des mers du sud, où chaque île fait un cadeau aux habitants de l'île voisine, sans rien attendre en retour.
Comme ces îles sont en chapelet et souvent en cercle, chaque donneur de cadeau reçoit forcément lui aussi, d'une île voisine, autre que celle à laquelle ils ont eux-mêmes offert.
Ainsi chacun donne sans attendre directement de retour, mais est assuré aussi de recevoir, par une autre voie.
Je trouve ce principe excellent, donner sans rien attendre, recevoir ce qu'on nous offre sans se sentir redevable.

Le principe de fonctionnement du "Koula" était simple, je le comprenais bien.
Par contre, les principes de travail des animateurs permanents, Tran et Isabelle, me paraissaient plus obscurs.
Je voyais bien sur quels registres ils travaillaient, mais je ne voyais pas de ligne directrice claire à l'origine de leurs interventions thérapeutiques, et me sentais tout à fait incapable de faire comme eux.
Peut-être mélangeaient-ils trop de techniques différentes.
D'ailleurs ils ne devaient pas être convaincus eux-même de l'efficacité de leur approche, car ils en ont finalement changé pour adopter une ligne plus "spirituelle" et centrée sur la méditation et l'apaisement intérieur (donc l'opposé de l'expressivité du début).
Cela ne me convenait plus et n'allai plus qu'aux séminaires des animateurs extérieurs.

Le "Co-conseil"
A cette époque je m'inscrivis à la faculté libre de Vincennes, où était enseigné le Koula, et j'y suivis aussi l'UV (unité de valeur) de "Co-conseil", animée par Philippe Grauer.
Cela avait été propagé par Harvey Jackins, un américain, alors qu'il était au chômage.
Il avait découvert comment une simple écoute pouvait soulager la souffrance.
Son livre : "le côté humain des êtres humains", ed Présence, Overijse, Belgique.
Leur site (en anglais) :
Re-evaluation Counseling - Home Page

Le fonctionnement de base était très simple, mais il y avait des principes de stimulation qui m'échappaient un peu.
Je me contentais donc de donner une écoute simple, sans intervenir de quelque façon.

Cela me faisait du bien, cela marchait par rendez-vous chez l'un ou l'autre pratiquant.
Bientôt, mon amie fut jalouse de me voir aller chez telle ou telle, et leur dire des choses profondes et intimes.
Je dus cesser, mais je regrettai plus tard d'avoir cédé, car ce travail m'avait bien ouvert émotionellement, et j'aurais sans doute pu progresser davantage.

Je fais de la Bio Energie

Je rencontrai des personnages qui furent importants pour moi, tous venus des U.S.A.
Je ne me souviens pas des noms de tous.

Un anti-psychiatre
Un que j'avais bien aimé était Jérôme Liss. C'était un anti-psychiatre. Il nous faisait pratiquer la bio-énergie. Il nous faisait sortir nos colères en nous faisant taper avec une massue sur un cheval d'arçon (nous étions dans une salle de gym) en hurlant.
Il avait aussi besoin que le groupe se serre autour de lui et lui communique son énergie.

Une habile masseuse nue
Une autre bonne expérience fut avec une jeune et charmante personne, Vickie Sommer, qui pratiquait le massage Reichien.
Je retrouvai là la nudité innocente de la communauté, et en plus il y avait le contact.
Nous étions tous entièrement nus, isolés et confinés entre nous, et le climat semblait très calme et pur.
C'est elle qui s'était mise nue la première, jetant son slip au plafond, et tout le monde avait fait comme elle, sans poser de question. Il ne me semble pas que nous ayons été prévenus avant.

Elle avait un don extraordinaire pour débusquer les blocages énergétiques dans le corps, et les chasser vers les extrémités, sous formes de boules qui semblaient rouler sous la peau, et qu'elle évacuait par les doigts des mains ou des pieds.
En même temps apparaissaient et s'exprimaient de fortes émotions, comme contenues dans ces fameuses boules.
J'ai ensuite pratiqué un certain temps ce massage avec des membres de ce groupe, en obtenant un soulagement des tensions, mais jamais de manifestations émotionnelles. Je ne sais pas comment elle s'y prenait.

Un bioénergéticien solitaire
Un autre bioénergéticien arriva, toutes ses affaires dans un petit sac sur son dos.
Il travaillait avec chacun individuellement. Les autres membres du groupe restaient livrés à eux-mêmes, et il s'ensuivait une certaine dispersion, chacun bavardant à droite à gauche, ou se promenant ici où là.
Michel Meignant était présent, et en profitait pour donner des consultations (gracieuses) dans les couloirs.

Ce bioénergéticien était très concentré sur son client, travaillant essentiellement par imposition des mains.
Il repérait d'abord l'allure corporelle du client en le faisant sauter sur place. C'était frappant de voir comment dans ce simple acte chacun se comportait différemment, aussi bien à travers l'expression du visage que dans les mouvements du corps.
Il posait les mains sur certains points clés, et on voyait littéralement l'énergie se remettre à circuler, se manifestant par des rougeurs, des tremblements, des secousses.
Pour garder la concentration, il prenait beaucoup de pilules stimulantes.
C'était complètement non-verbal, il n'y avait pas non plus d'émotions qui surgissaient.
C'était uniquement corporel et énergétique.
Je trouvai cela intéressant et assez impressionnant, mais sans doute à pratiquer individuellement et régulièrement pour un bienfait durable.

Un adepte du cri primal
Celui-ci, élève de Janov, voulait nous faire exprimer notre cri originel.
Il nous en fit une belle démonstration, alors qu'il se trouva déstabilisé un moment donné au cours du séminaire, et éprouva le besoin de le faire lui même.
Sur le dos, il se mit à frapper très fort des mains et des pieds, en poussant des hurlements terribles. On aurait dit un énorme bébé qui poussait sa colère.
Au bout d'un moment il se calma et redevint normal.
Une amie qui était avec moi dans ce séminaire le suivit jusqu'aux USA pour pousser plus loin dans sa méthode.
Mais elle en revint inchangée. Elle n'avait toujours pas réussi à laisser aller sa colère intérieure.
Pour ma part je ne fus pas convaincu par cette méthode qui se limitait à pousser des cris.

Gerda Boyesen et la végétothérapie
Ce fut un séminaire d'été en résidentiel d'une semaine.
De par sa durée même, il ne pouvait qu'être plus efficace que les autres.
Gerda vérifiait l'état de notre énergie interne en écoutant au stéthoscope les gargouillis de notre abdomen.
D'où le nom de sa méthode.
Je rencontrai dans ce groupe une amie qui devint très proche et très chère, avec qui j'eus une relation très fusionelle.
Sans doute parce que j'y avais brisé ma cuirasse émotionnelle, comme je le décris à " Je découvre l'énergie... "
Je fus étonné de découvrir à ce stage les réactions automatiques du corps, comme lorsque, ayant fait une séance assez intense avec Gerda, j'étais encore sous le choc émotionnel et incapable de suivre les autres pour aller déjeuner, elle me laissa seul après m'avoir recouvert d'un matelas. Mon corps se recroquevilla de lui-même, comme un foetus, sans doute parce qu'il retrouvait ainsi quelques unes des sensations originelles dans le ventre de la mère : le noir, le chaud, la sensation d'être physiquement protégé contre l'extérieur.
Je n'eus pas l'occasion de continuer dans cette voie, qui de toute façon me paraissait partielle et incomplète comme tout ce que j'avais fait jusqu'à présent en bioénergie.

Le Katsugen de Itsuo Tsuda

C'est à cette époque que je pris contact avec le Katsugen de Itsuo Tsuda.
tous les détails dans : "
Comment j'ai découvert le Katsugen "
Je pratiquai parallèlement la Katsugen et les thérapies de groupe.
La pratique du Katsugen affina ma sensibilité, et je perçus d'une façon plus fine ce qui se passait en moi dans mes groupes.
Aussi je n'acceptai plus certains types de travail, ainsi que je le développe plus bas.
Je crus même à une certaine époque pouvoir me contenter du katsugen, que je pratiquais alors d'une façon très intense.
Tsuda avait arrêté son enseignement (provisoirement) et, seul dans ma petite maison dans les bois, je pratiquais durant des journées entières, sans mettre le nez dehors.
Mais les circonstances de la vie me montrèrent que le Katsugen ne résolvait pas les problèmes émotionnels et affectifs, et à ce moment là la meilleure méthode pour cela me parut être la Gestalt-thérapie.

Je découvre la Gestalt Thérapie

Je fis une longue série de séminaires, de week-end et longs en résidentiel, avec Barry Goodfield, qui avait été élève direct de Frédéric Perls, l'inventeur de la Gestalt Thérapie.
Il nous faisait travailler sous hypnose légère, ou si on préfère sous détente profonde, deux par deux, l'un assistant l'autre, et il circulait entre les couples, aidant à son tour quand il se passait quelque chose d'important dans un couple de travail particulier.
Le "patient" s'allongeait sur le dos, les yeux fermés, l'assistant assis tout près de lui, pendant que Barry récitait une mélopée destinée à nous faire descendre en nous- mêmes, du style :
"Quand je compte de 3 à 1, vous allez de plus en plus profond, 3,2,1..."
et en répétant cela sans arrêt on finissait par se trouver effectivement dans l'état désiré, comme si le subconscient obéissait malgré nous à ces injonctions venues de l'extérieur.
Il nous était alors dit de laisser venir les sensations, les émotions, les images, et surgissait alors de nous-mêmes diverses choses que nous vivions comme en rêve éveillé.
Cela aussi s'apparentait à la bioénergie, mais j'en trouvais la méthode plus subtile, on laissait venir naturellement nos contenus émotionnels intérieurs, mais ce qui me gênait, c'était ce que le thérapeute faisait avec ces contenus : je le trouvais trop intervenant, et que cela bloquait l'approfondissement de mon expérience.
Pour nous faire "travailler", l'animateur nous mettait en défi physique, et un jour que je me défendis trop énergiquement, il me traita d' "homme dangereux", et je trouvai que sa méthode était arrivée pour moi à une impasse.

Aussi je préférai continuer de pratiquer avec Serge Marland (pédiatre de profession), que j'avais rencontré dans ces séminaires.
Il accepta de m'assister sans intervenir, de façon à me laisser suivre le cours naturel de mon expression, ainsi que je l'avais appris dans les séances de Katsugen avec Itsuo Tsuda , dans l'esprit du "non faire".
Ce n'était pas sa façon habituelle de travailler, et il me dit qu'ainsi il se sentait réduit à l'état de potiche.
Cependant il constata que cela marchait pour moi, et il continua.
Il a décrit sa pratique en Gestalt Thérapie dans son livre :
"Guérir des pièges de notre enfance", ed le Seuil.

Avec d'autres amis rencontrés dans les groupes de Barry Goodfield, nous fîmes des séminaires "auto gérés", mais en fait gérés par Serge Marland, dans la belle maison de campagne dans laquelle je vivais à cette époque, en vallée de Chevreuse.

Puis ce groupe se dispersa, et je continuai la Gestalt avec
Marianne Dubois dans le Dojo que je venais d'installer à Paris 19e.
Nous nous retrouvions souvent seuls tous les deux au cours d'Aikido, et en profitions pour faire une séance Gestalt.
Cela libérait notre énergie, et trouvions qu'ensuite nous faisions une meilleure séance en Aikido.
Ces séances ont débouché sur son expérience intérieure qu’elle décrit dans son premier ouvrage : « Rencontres Solaires ».

Un groupe Anti-Psychiatre

Je fréquentai un an durant un groupe anti psychiatre, composé de personnes qui se dénommaient elles-mêmes "anciens psychiatrisés".
Nous n'étions que des "malades" ou anciens malades, à l'exclusion de tout personnel soignant.
Le groupe était organisé, ou du moins voulait l'être, à la façon des Alcooliques Anonymes, c'est à dire d'une façon complètement autogérée et autonome.
La personne qui était à l'origine de ce groupe venait elle même des AA, et cherchait à l'organiser de la même façon.
Mais les participants semblaient rebelles à toute organisation.
Il y avait un petit noyau permanent, et beaucoup qui ne passaient qu'une fois, lâchant leur témoignage comme un cri, et ne revenaient plus.
Les permanents exprimaient à chaque séance leurs mêmes délires, dénués de toute logique et de tout dialogue.
Mais cela fonctionnait quand même, hors de toute organisation.
Cela faisait du bien à chacun de pouvoir lâcher en témoignage ce qu'il avait à l'intérieur de lui, et je pouvais voir en fin de séance les visages satisfaits.
Mais cela ne satisfaisait pas l'initiateur, qui semblait tenir à son modèle organisationnel calqué sur celui des AA., Chaque fois il venait avec ses projets de statuts, mais il plaidait dans le vide, personne ne l'écoutait ni ne faisait attention à sa demande.
Alors au bout d'un an il décida d’arréter l'expérience.
Dommage. Je ne me sentais pas capable moi-même d'en prendre la tête, et le groupe se dispersa.

Je fréquente les Alcooliques Anonymes

Mon ami me dit que, puisque je m'intéressais aux groupes autogérés, je devrais venir avec lui assister à une réunion des Alcooliques Anonymes.
J'acceptai, et allai à une réunion qui avait lieu les samedis après-midis dans une belle salle vitrée prêtée par l’hôpital de la Salpétrière, près de la gare d'Austerlitz, au premier étage avec vue sur le parc.
Dès le premier instant je fus fortement choqué par l'aspect très dégradé des participants.
Ils avaient des visages ravagés, déformés, des expressions souvent hagardes.
Il y avait là au moins 20 participants, assis derrière des tables arrangées en carré, de façon à ce que tous se fassent face.
Certains venaient même en fauteuil roulant.

Le principe était que chacun s'exprime à tour de rôle, s'il le désirait.
Beaucoup disaient simplement : "J'écoute".
Les échanges étaient centrés sur l'alcool, et les 12 étapes de rétablissement.
Le principe était de reconnaître qu'on était alcoolique, puis de déculpabiliser en considérant que c'était une maladie, et non un vice.
Pour cela, chacun commençait à s'exprimer en disant : "Je m'appelle Untel, je suis alcoolique ...."

Je fus tellement choqué par l'aspect de mes compagnons que j'arrêtai moi-même aussitôt de boire.
J'avais sous les yeux où l'abus d'alcool pouvait mener un être humain.
Les témoignages de la plupart étaient pathétiques, terribles.
Leur comportement alcoolique leur avait fait tout perdre dans la vie : santé, famille, travail, logement...

Je ne me considérais pas moi-même jusqu'à présent comme alcoolique, mais il me fut dit que c'était justement la caractéristique du vrai alcoolique de ne pas vouloir reconnaître qu'il l'est.
C'est pour cela que le premier pas vers la sobriété est d'affirmer : Yves, alcoolique ...
C'est donc ce que je fis. (voir
Comment j'ai découvert le Katsugen ).

Je les fréquentai 3 ans et appréciai beaucoup leur modèle d'organisation.
J'aurais souhaité faire la même chose dans un domaine plus purement psychologique, mais n'y ai pas réussi jusqu'ici.

Je pratique la macrobiotique

Au groupe des Alcooliques Anonymes, je rencontrai une jeune femme qui devint mon amie.
C'est elle qui m'avait dragué. Elle me dit qu'elle ne venait aux AA que pour me voir.
C'était une fille extrêmement sympathique et douce.
Mais en plus d'être alcoolique, elle avait développé un cancer du sein, qui avait métastasé, et elle se sentait arrivée à la fin de sa vie.
C'est ce qui lui avait donné l'audace de m'aborder, moi qui ne l'avait même pas remarquée.

Elle était traitée en externe, et allait régulièrement se faire emplir son réservoir de chimio, qu'on lui avait implanté directement sur elle.
Je ne sais comment elle avait entendu parler de la macrobiotique.
Elle voulut essayer cela, comme ultime tentative de traitement alternatif à la médecine classique.
Pour l'aider, je l'accompagnai moi aussi dans son régime, et nous nous mîmes tous les deux à faire cuire du riz à toute vapeur.

Ce qui me frappait, dans la macrobiotique, c'est qu'on cuisait beaucoup, et ne mangeait rien de cru.
J'étais un peu frustré, moi qui aime bien les salades vertes et les fruits.
Un peu inquiet aussi, par rapport aux vitamines.
Et puis cette philosophie du Yin et du Yang me paraissait un peu simpliste et réductrice.
On ne tenait pas du tout compte de la composition nutritive des aliments. Seulement du Yin et du Yang.
La Macrobiotique était alors diffusée par Mishio Kushi, successeur du fondateur Maître Oshawa.
Justement, il venait à Paris faire une conférence. Marie-Thérèse et moi nous y précipitâmes.

Je fus peu convaincu par le discours, qui me semblait manquer d'objectivité et de réalisme.
Du genre : "La céréale est l'aliment naturel de l'homme, car c'est ce qui est le plus cultivé".
ou : "La forme naturelle du crâne de l'homme est oblongue comme une céréale".
et encore : "A force de manger trop de poulet, on devient poulet" (en apparence physique).

Ses nombreux assistants, très sollicités et occupés, donnaient des consultations particulières (moyennant finances) pour adapter à chacun son régime. J'en pris une.
L'homme me parla pendant que sa secrétaire notait à mon intention tout ce qu'il disait.
Il me dit textuellement que j'étais fou, que je ne pouvais pas avoir de jugement personnel fiable, et que je devais si je voulais m'en sortir suivre exactement ses prescriptions.
Il me conseilla de quitter Paris, lieu de perdition pour l'âme, et me prescrivit un régime alimentaire à la cuisson complexe, quasiment pour moi inapplicable.

Je pratique l'instinctothérapie

Marie-Thérèse mourut peu de temps après.
Je continuai néanmoins la Macrobiotique, et allai au salon Marjolaine des produits biologiques et écologiques, pour m'acheter les instruments de cuisson nécessaires au régime complexe qui m'avait été prescrit.
Je trouvai les casseroles que je cherchais, mais avant de les acheter décidai de faire un tour du salon.
Dans un stand je remarquai des personnes joyeuses à la trogne bien rouge.
Ce n'était pas l'effet du vin. C'était le stand de l'instinctothérapie.

Ces personnes étaient très différentes des adeptes de la macrobiotique, qui étaient généralement plutôt tristes ou au moins sérieux, et le teint jaune et cireux.
Cela me convenait mieux.
Je me renseignai : le principe de manger tout ce qu'il nous plaît me convenait aussi.
Je me précipitai sur un pot de miel (interdit en Macrobiotique parce que trop Yin) et le vidai en continuant ma visite.
Une fois rentré chez moi j'essayai de continuer seul, mais ce n'était pas évident, car il fallait manger tout cru.
(voir "
Comment j'ai découvert le Katsugen " et Bibliographie )
Je décidai alors d'aller suivre des stages d'initiation à leur centre de Montramé, près de Provins.

Le fondateur,
Guy-claude Burger , était un homme brillant à la rhétorique convaincante.
A la réflexion, je crois qu'il aurait pu démontrer n'importe quoi, et son contraire (il le disait lui-même).
Toujours est-il que ses séminaires marchaient bien, et il emportait l'enthousiasme de ses auditeurs.
Son discours était scientifique, logique, mais en même temps passionné, et il se présentait comme le novateur génial incompris et victime de l'Establishment, ce qui lui attirait sympathie et soutien, tant moral que financier. (Et il sut tirer sur cette corde sensible).

Je me passionnai pour cette pratique qui était aussi une philosophie, et je m'y mis à fond.
Là aussi, comme avec le végétarisme, j'eus la confirmation de l'influence de l'alimentation sur le psychisme.
Dès le premier jour, à la suite de mon repas de miel, je passai une nuit merveilleusement reposante et sereine, comme je n'en avais jamais eue.
A cette époque, je n'arrivais pas à me reposer la nuit. je me réveillais le matin aussi fatigué que la veille.
Avec l'instincto, je devins également calme et serein dans la journée.
Pour Guy-Claude Burger, c'était l'effet de la suppression du blé, proscrit en instincto car trop dénaturé par les sélections faites par l'homme depuis des milliers d'années.
Il rend le blé responsable de "l'accrochage", c'est à dire l'incapacité à écouter autrui en étant prisonnier de ses propres obsessions mentales.
Ce serait la cause, par exemple, des guerres de religion, encore de nos jours avec l'intégrisme.

Je voyais là une nouvelle explication du monde qui me ravissait, me donnait la sensation d'avoir enfin touché la terre ferme, après tant d'années d'errances dans l'océan de l'incompréhension et de l'ignorance.

J'étais prêt à changer de vie, et cela se produisit bientôt ...